Genre : policier
Editions Sombres Rets
année de publication : 2008

Intrigue : deux vieux tenants de bar marseillais, Ange Saint-Gabriel et Robert Gianotti, se retrouvent démunis de tout après l’incendie de leur bistrot. Découvrant qu’il s’agit d’un acte malveillant, ils n’ont de cesse de trouver leur mystérieux ennemi pour se venger de lui. Ils s’aperçoivent vite que l’affaire dans laquelle ils ont mis le nez sent très mauvais…

La scène ouvrant le roman est assez délectable. Outre le parler marseillais déjà suffisamment truculent en lui-même, la vision de ces deux quinquagénaires en train de s’enfiler bouteille sur bouteille pour ne pas les laisser entre les mains de leurs créanciers est savoureuse. De même, les dictons du grand-père d’Ange ou d’autres personnages égrènent des notes d’humour dans tout le roman. En voici un avant-goût : « Fais du bien à Bertrand et il te le rendra en caguant ! » où caguer signifie « déféquer »… Heureusement que Cyril Cagau a pensé à ajouter un « petit lexique à l’attention des estrangers » ! Sinon, il est évident que le lecteur estranger aurait compris nibe à certains dialogues et aurait eu l’air d’un calu… Dans ce polar à la marseillaise, ça cogne, ça intrigue, mais en plus ça biberonne le pastaga en permanence. On rigole bien dans la première moitié du roman mais la comédie tourne à la tragédie en fin de parcours.

Morceaux choisis : « Il avait un physique proprement affreux : vérolé, avec une tête énorme, des cheveux blonds filasses, clairsemés, il louchait légèrement et parlait avec une grosse voix bourrue. De taille moyenne, son gros ventre et ses petites jambes lui conféraient l’aspect d’un nain qui aurait grandi trop vite. Un T-shirt rouge élimé et un bermuda vert finissaient de l’assassiner esthétiquement. Le spécimen, donc, nous expliquait, sans sourciller et avec le plus grand des sérieux, qu’on l’avait emmené ici à la suite d’un concours de circonstances qui, d’après lui, nous ferait crier à l’injustice. Car il ne doutait de rien, le bonhomme. C’était un sex-symbol. Il y pouvait nibe ; c’était dans sa nature. Il plaisait aux femmes. À toutes, sans distinction, il avait ça dans le sang… »

« Je suis le chiropracteur-né, le guérisseur par l’extase ; car d’une simple touche, avec mon doigté de velours, je fais disparaître lumbago et autres courbatures, pas une sciatique qui ne me résiste… avec moi la douleur danse et s’enivre, pétille comme du Champagne et se dissipe en nuées. Ce n’est pas un massage mais un tango, ou une quadrille, ou un jerk ! Enfin, rappelle-toi, comme j’avais emballé Yvette au balletti. Tous la badaient du regard, et moi, c’étaient des ondes que je lui envoyais. Ca ne nous rajeunit pas, on avait trente berges de moins, mais ce temps-là n’est pas mort avec les années, je me sens encore vert, l’expérience en plus. On va danser, on va tout recouvrer, on va le faire refleurir le printemps de nos vingt ans, l’Angelot ! On n’est pas encore enterrés, fan de chichourle ! »